Vive les vins beaux, bons, bio

Je ne sais pas vous, mais moi, depuis que j’ai pris conscience de la dose massive de traitements chimiques que l’on fait subir à la vigne, je regarde mon verre de vin avec une certaine suspicion. J’ai peur d’avaler une tonne de résidus de pesticides quand je déguste mon jus de raisin savamment fermenté. Du coup, je m’intéresse aux vins bio depuis un petit moment mais force est de constater que je vais souvent de déceptions en déceptions.
Je reste pourtant convaincue que nous devons changer nos méthodes de culture, sélectionner des cépages résistants, s’appuyer sur la biodiversité pour limiter maladies et attaques de ravageurs… Bref, utiliser les ressources que la nature met à notre disposition plutôt que vouloir à tout prix la dominer. Dans « Dédicace sans auteure », la 4e affaire de la commissaire Bombardier, j’effleure le sujet de la pointe de mon stylo et en m’appuyant sur une excellente interview d’Antoine Gerbelle, l’un des meilleurs dégustateurs français.
Extrait :
— Bonne mère ! Pour un blanc sec, j’aime bien son parfum fruité. Il est vif et pourtant, sa rondeur en bouche est intéressante. C’est pas mal, pas mal du tout, peuchère.
— ça, c’est parce que mes terres sont exposées au sud. Elles sont sur les pentes de la rive droite du Tarn. C’est ce qu’on appelle les premières côtes. Je n’ai pas de gros rendements ; c’est sûr, mais j’obtiens des vins élégants. Peu de mes confrères peuvent en dire autant.
— Au niveau longueur en bouche… Comment dire ?
— Peut faire mieux ? C’est ça ? C’est parce que c’est un vin bio. Chez moi, on ne maquille pas le vin. Je refuse de recourir à des artifices. Il est, on ne peut plus, naturel. Avec le temps, la fin de bouche s’améliore petit à petit.
— Ah, vous vous êtes converti en bio ?
— Oui. Je n’ai pas grand, mais mes terres sont bonnes pour la vigne et bien exposées. Il fallait que je trouve un moyen de me démarquer. Le bio, c’est l’avenir, de toute façon. J’ai replanté, il y a déjà quelques années pour me débarrasser des cépages que l’on sélectionnait avant, surtout pour le sucre et le degré d’alcool. Moi, ce que je recherche avant tout, c’est le goût. Pour le rouge par exemple, j’assemble plusieurs cépages typiques du coin : le Braucol, le Duras et le Prunelart. Je suis assez content du résultat. J’ai même failli passer à la biodynamie, mais finalement j’ai abandonné.
— Et pourquoi, hé ?
— Pas convaincu. Non seulement on ne doit utiliser que des préparations à base de plantes ou en tout cas de substances naturelles comme dans le bio, mais en plus on doit intervenir en fonction du calendrier lunaire, travailler avec les forces cosmiques. Ça, moi, j’ai du mal à y croire. Ma femme, elle, ça la branchait bien.
— Je comprends.
— Avec le bio, on produit des vins différents, riches en saveurs et plus typés par rapport à leur terroir. En revanche, le degré d’alcool est souvent inférieur à une production traditionnelle. Moi, avec mes terres bien ensoleillées, je n’ai pas trop de soucis de ce côté-là.
— C’est quoi alors votre principal problème, en tant que vigneron bio ?
— Ah ben, c’est l’hygiène ; ça, c’est sûr. Comme je n’ai pas le droit d’utiliser beaucoup de soufre, je dois avoir une hygiène en cave irréprochable, pour la vinification, le stockage, tout. D’habitude, le soufre, c’est un peu notre « Monsieur Propre », à nous les vignerons.
— Et le soufre, ce n’est pas bon pour la santé.
— Comme beaucoup de choses, à haute dose. En plus, quand on en utilise trop, cela a un impact sur le goût du raisin. À l’inverse, ne pas en utiliser du tout, c’est risquer une mauvaise conservation, car le soufre protège le vin de l’oxydation.
— C’est pour ça que les vins bio ont en général un goût particulier, comment dire ? Comme un goût de poulailler… assez désagréable.
— Si la vinification est bien faite, avec une hygiène rigoureuse, cela ne doit pas arriver. Mais évidemment, si vous êtes du style à laisser faire la nature, pas trop regardant sur la propreté de votre cave… De toute façon, avant la première gorgée, je vous conseille de laisser votre vin s’oxygéner. Si le goût de poulailler persiste, buvez de l’eau.
Et vous, vous aimez le vin bio ?





Crédit photos : breakingpic, cottonbro, jill wellington, lulo et seb pour PEXELS

