La minute verte

Avoir le concombre tordu

Bienvenue en Absurdie !
C’était il y a dix ans. La commission européenne du 15 juin 1988 fixait les normes de qualité minimales pour la commercialisation des concombres. Le règlement portait notamment sur la courbure de la cucurbitacée. Ainsi les concombres devaient-ils être bien formés et pratiquement droits. La hauteur maximale de l’arc ne devait pas dépasser 10 millimètres pour 10 centimètres de longueur du concombre. On se demande bien pourquoi, si ce n’est pour pouvoir mieux standardiser le conditionnement.

Ouf ! Cette norme, contribuant très certainement au gaspillage alimentaire, a été abrogée en 2009 ! En effet, comment tolérer de jeter des produits comestibles du seul fait de leur forme ?

Les habitudes ont cependant la vie longue. Probablement parce que la sélection variétale, dont les résultats mettent des années à aboutir, a été orientée vers la recherche de formes « parfaites », aujourd’hui nous trouvons sur les étals encore beaucoup de concombres bien droits. Gageons que les obtenteurs orientent désormais leurs travaux vers des variétés plus gouteuses et résistantes naturellement aux maladies (pour limiter les traitements) et que dans quelques années, nous pourrons acheter des concombres tordus mais tellement bons !

Une pensée pour tous les concombres tordus.

Dans l’Angleterre du XIXe siècle, les concombres devaient absolument avoir une forme bien droite, et être sans taches et imperfections, ils avaient sinon de grandes chances d’être jetés aux cochons. Mais quand l’entourage de la reine Victoria a commencé à se prendre de passion pour le fameux sandwich au concombre, aujourd’hui devenu emblème national à l’heure du tea time, l’engouement autour du concombre s’est emballé et la production de la cucurbitacée a dû suivre le rythme. Pour être sûr que le sandwich soit visuellement plaisant, il fallait des concombres bien droits, et qui dit concombre droit, dit redresseur de concombre.

Cette incroyable invention sortie des poussières de l’histoire par Atlas Obscura doit sa naissance à l’ingénieur britannique George Stephenson, inventeur de la première locomotive à vapeur, et horticulteur émérite, surtout quand il s’agit des concombres. L’appareil conçu par Stephenson était un long tube de verre fin qui s’adaptait à un concombre en croissance comme un gant ou un moule géant, ce qui le fait étrangement ressembler à un préservatif en verre. De quoi faire pousser des concombres beaux et bien droits pour la reine d’Angleterre. À noter que des modèles de redresseurs de concombres sont encore commercialisés de nos jours, pour la modique somme de 39,95 livres (environ 45 euros). Article de Sixtine Jacquemin, paru dans Kombini Food.

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